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Trophée Jules Verne : au Cap Leeuwin

151210-Spindrift2En passant aujourd’hui la longitude du deuxième cap symbolique d’un tour du monde à la voile, Spindrift 2 annonce un retard en temps de 11 heures 25 minutes, mais en réalité, la trajectoire plus Sud du trimaran menée par Yann Guichard le positionne une quarantaine de milles en avance. Butant sur une dorsale depuis deux jours, l’équipage perçoit une issue avec l’arrivée d’une dépression venue de Madagascar.

Difficile d’expliquer qu’un voilier peut être devant quand il a du retard… C’est en fait ce qu’il se passe sur l’eau entre Spindrift 2 qui a passé la longitude du cap Leeuwin par 115° 08’ Est, ce jeudi 10 décembre à 15h27’ GMT (16h 27’, heure française) et le temps de référence de Banque Populaire V en 2011. L’explication vient du fait que plus un bateau est proche du Pôle Sud, plus le tour de l’Antarctique est court, puisque le globe terrestre est une sphère. Par exemple, un voilier qui suit le 40°Sud parcourt 459 milles pour effectuer 10° de longitude, quand le même bateau qui suivrait le 50°Sud ne parcourrait que 385 milles : soit un différentiel de 74 milles ! Pour une même vitesse et un même cap, la différence est donc significative…

Un juge de paix… Pacifique

Spindrift 2 a donc mis 18 jours 11 heures 25 minutes depuis le départ de Ouessant dimanche 22 novembre pour atteindre la longitude du cap Leeuwin en parcourant 12 295 milles à 27,73 nœuds de moyenne. Le delta vis à vis du temps de référence n’est donc pas rédhibitoire, même si les conditions météorologiques annoncées jusqu’à demain vendredi ne sont pas favorables pour le réduire : la dorsale qui bloque le trimaran noir et or ne va se dissiper que lentement et l’entrée dans l’océan Pacifique (Sud de la Tasmanie) prévue pour samedi aux aurores, ne devrait pas changer sensiblement la situation.

L’accélération ne devrait être marquée qu’en approche de la Tasmanie puisque cette dorsale va être balayée par la dépression venue de Madagascar qui va glisser sous l’Australie. Cette perturbation d’origine tropicale va apporter un flux puissant de Nord-Ouest et permettre à Dona Bertarelli, Yann Guichard et leurs douze équipiers de rester sur le 50°Sud au moins jusqu’à la pointe Sud de la Nouvelle-Zélande. Or c’est l’océan Pacifique qui va réellement déterminer la suite de ce Trophée Jules Verne puisque Banque Populaire V avait été très ralenti avec une traversée de 12j 22h du cap Leeuwin au cap Horn, quand son prédécesseur Groupama 3 avait réalisé cette tranche en 10j 14h.

Yann Guichard au téléphone ce jeudi en fin d’après-midi

« Un océan Indien pas facile à cause des glaces, mais surtout un Indien rapide au début et lent pour le reste. En particulier ces deux derniers jours où on bute sur une dorsale qui nous empêche de faire parler pleinement les capacités du bateau. Et cela risque de durer jusqu’au Sud de la Tasmanie. Certes, à partir de demain vendredi, le vent forcit et nous allons accélérer un peu. »

« Comme dans le Pacifique, Banque Populaire V a été assez lent, on peut espérer être devant au cap Horn mais c’est encore loin. Pour l’instant, les performances des deux équipages sont proches et cela devrait rester à peu près identique jusqu’à l’île Auckland. Mais tout cela reste un peu fictif parce que tous les temps du Trophée Jules Verne sont établis par rapport à une route idéale que personne ne peut suivre : quand le détenteur est virtuellement plus Sud que nous, il gagne du terrain et inversement. »

« A ce jour, il n’y a pas de glaces dérivantes devant nous mais cela va dépendre de notre route. Le Pacifique a l’air assez calme, sans grosses dépressions. Pour l’instant, il n’y a pas de gros temps ni devant, ni derrière. Par ailleurs, nous nous interrogeons sur l’usage du foil bâbord et ne savons pas si nous pourrons l’utiliser à nouveau. Cela va forcément affecter notre performance sur le long terme.​​ »

« On voit pas mal d’oiseaux qui nous suivent, des pétrels, des damiers du Cap, mais côté lumière, c’est plutôt gris et nous n’avons pas vu pour l’instant les luminosités australes ! En tous cas, nous sommes le bon nombre d’équipiers à bord et le système de quarts fonctionne de façon efficace. »

151210-IDECSportIDEC Sport quant à lui a refait son retard, Leeuwin cette nuit…

L’équipage de Francis Joyon est en train de réussir un pari à peine croyable : effacer 800 milles de retard en quatre jours ! Ce jeudi après-midi, ils n’ont plus qu’une trentaine de milles à combler. Et ils passeront à l’aplomb du cap Leeuwin dès cette nuit.

Ils n’en finissent plus de foncer les six marins d’IDEC SPORT engagé dans une folle course-poursuite depuis dimanche soir. Contre le chrono de référence du Banque Populaire V de Loïck Peyron – tenant du titre. Contre une dépression tropicale venant de Madagascar et qu’il fallait absolument garder derrière soi, c’est chose faite. Contre eux-mêmes enfin, pour « accepter le froid et accepter les hautes vitesses permanentes » comme dit Gwénolé Gahinet, qui débute son apprentissage des mers du Sud par cette incroyable chevauchée à travers l’Océan Indien.

Dans le froid polaire des latitudes australes comprises entre 52 et 54 degrés Sud, l’objectif des six hommes d’IDEC SPORT était clair : aller le plus vite possible, sur la trajectoire la plus tendue possible. C’est ce qu’ils font, se relayant chaque heure à la barre pour garder le maximum de concentration efficace. Les vitesses atteignent des sommets : moyennes à plus de 30 nœuds, pointes à 40, rythmes ramenés sur 24 heures supérieurs à 700 milles… Les bénéfices engrangés sont exceptionnels : alors qu’il avait donc 800 milles de retard voilà quatre jours et encore 300 milles hier soir, IDEC SPORT est quasiment revenu à hauteur du temps de référence ce jeudi après-midi ! moins cinquante petits milles en milieu d’après-midi… pourquoi pas une égalisation au score dès cette nuit ? On peut y croire.

Leeuwin en début de nuit

Alors oui, les champs de vent – plus faibles dans leur sud- vont obliger les hommes de Joyon à faire une route un peu plus vers le nord. C’est ce qu’ils font déjà d’ailleurs. Oui, les bénéfices inédits de ces quatre dernières journées vont probablement s’estomper peu à peu, au fur et à mesure que la trajectoire virtuelle du tenant du titre va, elle, repartir vers le sud. Mais qu’importe. Demain est un autre jour et on savait avant le départ de ce Tour du monde que s’il y avait effectivement du temps à gagner ce serait dans le Pacifique, où Banque Populaire avait dû laisser échapper du temps lors de son record victorieux. Pour le moment, il faut savourer le plaisir d’avoir fait mieux que réussir cette troisième semaine de course en engrangeant de la plus belle manière – très sud et très tendu – ces centaines de milles vraiment pas volées.

La nuit prochaine, le commando de Francis Joyon va franchir l’aplomb du deuxième des trois grands caps mythiques du Trophée Jules Verne : le cap Leeuwin, au sud-ouest de l’Australie. A tous ceux qui ne donnaient pas cher de leur peau voilà seulement quatre jours, ils passent un message on ne peut plus clair : IDEC SPORT conserve toutes ses chances. A 16h30 cet après-midi, ils n’étaient plus qu’à une petite trentaine de milles de faire jeu égal avec le tenant du titre. On a bien lu : ils ont repris plus de 750 milles en moins de quatre jours…

Crédit Photo : Yann Riou (Spindrift2), IDEC Sport

Tags sur NauticNews : Trophée Jules Verne, Dona Bertarelli , Yann GuichardSpindrift 2, Francis Joyon, IDEC Sport

– CP-

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