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VG2020 : retour sur 24 heures de folles arrivées

Pour la première fois dans l’histoire du Vendée Globe, on a vu huit concurrents se succéder sur les pontons des Sables d’Olonne en l’espace de 23 heures et 44 minutes. 23 heures et 44 minutes de joie et d’émotion, aussi intenses que cette régate planétaire qui se sera jouée au contact de bout en bout. Il a fallu attendre l’arrivée de Jean Le Cam, jeudi soir, pour mettre un ordre définitif dans la hiérarchie de cette course folle.

Yannick, Charlie et Louis, grimpent sur le podium de cette édition exceptionnelle. Mais dans leur sillage, il y a aussi de grands marins et de grands hommes sans qui la course et la victoire n’auraient pas été aussi belles.

Qui pouvait imaginer que le 30 novembre dernier, la recherche du skipper de PRB dans son radeau de survie allait joindre les destinées des sauveteurs, Jean Le Cam, Sébastien Simon, Yannick Bestaven et Boris Herrmann d’un côté, et des leaders Charlie Dalin et Thomas Ruyant, trop loin devant pour faire demi-tour ? Qui pouvait imaginer que les compensations de temps, mêlées à une météo favorisant le regroupement permanent de la flotte participeraient à la légende de ce 9e Vendée Globe ? Huit bateaux sont arrivés en l’espace de 23h44, entre mercredi et jeudi soir – pour rappel, en 2016, le 8e avait franchi la ligne 19 jours et 19 heures après le vainqueur Armel Le Cléac’h-.

Cette édition se conclut donc par un vainqueur qui arrive troisième, un deuxième qui arrive premier, un troisième qui arrive deuxième et un quatrième qui arrive huitième… Vous suivez ? Non ? Alors simplifions.

Yannick, Charlie, Louis …

Le podium, d’abord. Yannick Bestaven, vainqueur de cette 9e édition a prouvé qu’avec de la maturité, du talent, de l’opiniâtreté, un projet simple, mais structuré autour des bonnes priorités, on pouvait faire des merveilles. Sur l’eau, le marin a impressionné par sa capacité à ne rien lâcher et à faire marcher son bateau. Il a aussi séduit par sa sincérité et son humanité. « Il y a deux vainqueurs sur ce Vendée Globe » a dit le skipper de Maître CoQ IV, jeudi matin, dans l’intimité des retrouvailles sur le ponton avec Charlie Dalin…

Le skipper d’Apivia est celui qui a dominé sur l’eau, en tête de la course presque la moitié du temps. Il termine deuxième. La victoire finale lui échappe pour moins de 3 heures. Mais le prodige du Figaro a montré encore une fois qu’il avait l’étoffe des grands champions. Il a pris de l’épaisseur, aussi, en tant qu’homme. Son périple autour du monde l’a transformé confie-t-il. Et plus jamais il ne verra les choses comme avant.

Louis Burton monte sur la dernière marche du podium. Le skipper de Bureau Vallée 2 est le plus « rock’n roll » de la bande. Intrépide, dur au mal, franc du collier, il a pensé abandonner plusieurs fois devant la cascade de pépins techniques qui s’est abattue sur lui. Ses efforts de Titan ont été récompensés par cette belle 3e place, à bord du bateau vainqueur de l’édition précédente.

… Et les autres

La course de Jean Le Cam fut autant héroïque que son sauvetage de Kevin Escoffier. Quatrième au classement général, Jean Le Cam a eu un accueil à la hauteur de l’engouement qu’il a suscité pendant 81 jours. Lui non plus n’a pas échappé aux grosses galères. Et sous ses airs de fanfaron, il a prouvé qu’à 61 ans, il n’avait rien perdu de son immense niaque de compétiteur. Boris Herrmann prend la 5e place, après s’être fait très peur, à quelques heures de l’arrivée, lors d’une collision avec un chalutier. Le skipper allemand qui avait lui aussi été bonifié pour son implication dans le sauvetage de Kevin Escoffier, a été en lice pour la gagne pendant les 48 heures précédent le finish. Son flegme, son élégance et son côté ‘bon élève’, sont une forme de pudeur qui masque en réalité un être sensible et déterminé. Boris a été d’une régularité de métronome dans le top 10 et s’est battu pour ne jamais décrocher la tête de course. Sixième, Thomas Ruyant est certainement le grand perdant du classement. Ce rang ne reflète pas du tout sa prestation sur l’eau. Car le skipper de LinkedOut a passé les deux tiers du parcours dans le trio de tête, avec un foil cassé avant même d’entrer dans l’océan Indien. La course au large est souvent injuste. L’histoire de Thomas fera partie de ces moments amers. Pas facile à avaler pour ce marin de talent, au tempérament attachant, qui a été un des grands acteurs de cette édition.

Derrière lui, Damien Seguin a impressionné son monde. Le double champion paralympique a ajouté une ligne à un palmarès déjà exceptionnel. Né sans main gauche, il n’a pas forcément voulu porter l’étendard du handicap, mais fait passer un message fort, celui selon lequel il faut oser aller au bout de ses rêves, quelle que soit sa différence.
L’Italien résident à Lorient Giancarlo Pedote a illuminé la course avec ses saillies philosophiques. Il signe aussi la meilleure performance d’un skipper transalpin sur le Vendée Globe et a remis les pendules à l’heure quant à ses grandes qualités de compétiteur.

Enfin, l’enfant du pays, Benjamin Dutreux, 9e, est arrivé ce vendredi matin à la maison.

« Je venais pour y mettre mes tripes et me battre, régater et me surpasser » a t-il déclaré en conférence de presse. Objectif atteint pour ce marin formé à l’école du cata de sport et du Figaro.

24 heures d’émotion

Ces 24 dernières heures aux Sables d’Olonne ont donc été d’une densité incroyable. Les « atterrissages » successifs de tous ces navigateurs ont fait déferler des vagues d’émotion et de joie dans le port vendéen. Dans la chaleur des retrouvailles entre ces solitaires acclamés par les terriens, on a entendu des mots de soulagement, des aveux de force ou de faiblesse, des confidences sur les soucis techniques ou les instants magiques, on a vu des yeux brillants de plaisir ou de fatigue, des embrassades, et beaucoup de fraternité entre tous ces concurrents qui ont partagé une expérience unique et intense pendant ces 80 jours de mer.

Pas de répit pour les braves : 16 solitaires encore en mer

Maxime Sorel est le prochain marin attendu sur la ligne d’arrivée des Sables d’Olonne demain, samedi 30 janvier, entre 5h et 7h du matin. Le skipper de V and B – Mayenne poursuivi par une dépression hivernale doit faire vite sous peine de terminer sa course dans des conditions dantesques. 40 nœuds, rafales à 50 et surtout une mer démontée se profilent dans le tableau arrière du Cancalais. Et ce n’est pas une, mais deux dépressions qui vont débouler ce week-end dans le golfe de Gascogne ! Armel Tripon, lui, a décidé hier de laisser passer la tempête et de patienter le long des côtes espagnoles entre Porto et Vigo puis de reprendre sa route après. « Lundi, je devrais pouvoir faire route, je devrais arriver mardi ou mercredi. C’est un peu surréaliste comme situation. » confiait le skipper de L’Occitane en Provence dans la matinée. Moins de 1 000 milles derrière le bateau jaune et noir, Clarisse Crémer (Banque Populaire X) est aux réglages et très concentrée pour ne rien casser d’ici l’arrivée : « Je deviens un peu parano car, si proche du but, on n’a pas envie qu’il nous arrive quelque chose. » soulignait ce matin la navigatrice. Entre le cap Vert et Les Canaries, Romain Attanasio voit foncer sur lui Jérémie Beyou à 17 nœuds. Plus au sud, dans les alizés de nord-est, Arnaud Boissières prend le large : il s’échappe du groupe Roura/Shiraishi/Le Diraison/Hare, l’Espagnol Didac Costa faisant son entrée dans le Pot au Noir.

5 skippers la tête à l’envers

Manu Cousin se bat pour garder sa place de 21e dans des conditions typiques des alizés de l’hémisphère Sud, au large du Brésil. « Les grains n’arrêtent pas de se succéder. Je règle en permanence. Ça passe de 8 à 35 nœuds, donc on change les voiles ! Mais je me bats, je ne lâche rien ». Derrière lui, Miranda Merron et Clément Giraud sont bien revenus. La bagarre est âpre entre ces trois IMOCA à dérives droites et la route est encore longue : 3 800 milles jusqu’en Vendée ! Un duel se déroule à ciel ouvert au grand large de l’Uruguay : Alexia Barrier et Ari Huusela ne sont séparés que de 50 milles en approche d’une dorsale. Comprenez que les deux solitaires vont mouiller le maillot à la manœuvre dans les heures à venir !

CLASSEMENT à 18h00 Heure Française

(…)

  1. Maxime Sorel, V and B – Mayenne, à 185.14 milles de l’arrivée
  2. Armel Tripon, L’Occitane en Provence, à 297.47 milles du 10ème
  3. Clarisse Crémer, Banque Populaire X, à 1 193.98 milles du 10ème
  4. Romain Attanasio, PURE – Best Western ®, à 1 884.05 milles du 10ème
  5. Jérémie Beyou, Charal, à 2 009.5 milles du 10ème

Crédit Photo : Y. Zedda

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